mardi 19 juillet 2016


Une noisette, un livre


Le désert ou la mer

Ahmed Tiab

Photo © Squirelito


Deux pays, l’Algérie et le Niger. Deux personnages centraux : Kémal et Fatou. L’un est commissaire. L’autre, étudiante infirmière, veut sortir de sa condition devenue intenable au Niger. Leurs routes vont finir par se rencontrer, Kémal Fadil voulant absolument se saisir du dossier du trafic humain parce que trop de corps de migrants africains échouent sur les plages d’Oran.
Autour du commissaire, le fidèle Moss et sa mère Lela qui, elle aussi, a une histoire. Fatou, désignée future victime d’un oncle sans scrupules, décidera de s’enfuir, loin, très loin, grâce à sa rencontre avec Ali. Au cours de son périple, elle rencontrera Johnny, d’autres bonnes âmes et de nettement moins bonnes...Un désert où circule parfois (souvent) le pire.

En alternant les histoires des deux principaux protagonistes, Ahmed Tiab donne un rythme dynamique qui ne laisse aucun répit au lecteur et qui permet de plonger au cœur de l’enfer des migrants et de ces ignobles profiteurs de la misère.

De judicieux flash-back historiques aident à mieux comprendre la société algérienne d’aujourd’hui, société entre ses doutes, ses peurs, ses excès aussi.

Au-delà du polar, c’est un véritable récit sur la cruelle réalité d’un monde où l’homme n’est qu’un élément dont on peut jouer de lui, une analyse sur le sort des femmes dans la société africaine, un regard objectif sur une religion divisée, un pamphlet contre les autorités aveugles...
Une fiction humaniste, sensible qui ne peut qu’alerter sur des situations qui durent depuis trop longtemps et sur l’ignominie des organisations criminelles, parfois bien dissimulées... Le tout, parsemé avec des instants de beauté et un saupoudrage d’humour bien envoyé.

Enfin, deux phrases me semblent essentielles à retranscrire. Parce qu’elles sont justes, parce qu’elles permettent d’aller au-delà d’une simple lecture : 

"L’étranger demeure l’éternel coupable, surtout lorsqu’il est faible et démuni"

"La Z.A.C (…) un espace sans horizon, grouillant de gens soucieux de vérifier la permanence de leur pouvoir d’achat. Là où l’homme cesse d’être un humain et devient un code de carte bleue"


A méditer...

P.S. Je tiens à remercier le remarquable site Quatre Sans Quatre qui permet de découvrir des ouvrages peu médiatisés et qui pourtant méritent amplement d’être lus.


Le désert ou la mer – Ahmed Tiab – Editions de l’Aube – Mai 2016



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